Cancer du sein : la pollution augmente le risque de 28%

Cancer du sein : la pollution augmente le risque de 28%

Au congrès de la Société européenne d’oncologie médicale, les données d’une étude liant l’exposition aux particules fines et le risque accru de cancer du sein

Le lieu de naissance détermine également le risque de tomber malade. Et pas seulement à cause des différences dans l’accès aux soins, thème qui a toujours été présent dans le système de santé italien avec la fracture Nord-Sud. Ces dernières années, la recherche scientifique s’est concentrée sur le lien entre environnement et santé dans un concept qui devrait nous être désormais familier : One Health. Et ici aussi, au congrès de la Société européenne d’oncologie médicale, qui se tient à Madrid du 20 au 24 octobre, nous en parlons grâce aux résultats d’une étude qui montre comment les femmes qui vivent et travaillent dans des endroits où l’air est plus élevé les personnes polluées par les fines particules de poussière sont plus susceptibles de contracter un cancer du sein que celles qui vivent et travaillent dans des zones moins polluées.

À quel point les particules fines sont-elles nocives ?

« Nos données ont montré une association statistiquement significative entre l’exposition à long terme à la pollution atmosphérique par les particules fines, à la maison et au travail, et le risque de cancer du sein. Les résultats diffèrent de ceux de recherches antérieures qui portaient uniquement sur l’exposition aux particules là où vivaient les femmes et qui montraient peu ou pas d’effet sur le risque de cancer du sein », a-t-elle déclaré. Béatrice Ferverschef du service environnement de prévention du cancer, Centre de lutte contre le cancer Léon Bérard en France.

28 % de risque en plus

Dans l’étude, l’exposition à la pollution au domicile et sur le lieu de travail de 2 419 femmes atteintes d’un cancer du sein a été comparée à celle de 2 984 femmes sans cancer du sein entre 1990 et 2011. Les résultats ont montré que le risque de cancer du sein augmentait de 28 % lorsque l’exposition à la pollution atmosphérique par de fines particules (PM2,5) augmentait de 10 µg/m3, soit à peu près l’équivalent de la différence de concentration de particules PM2,5 généralement observée dans les zones rurales par rapport aux zones rurales. zones urbaines d’Europe. Un risque plus faible de cancer du sein a également été enregistré chez les femmes exposées à des niveaux élevés de pollution atmosphérique provenant de particules plus grosses (PM10 et dioxyde d’azote). Des chercheurs français envisagent désormais d’étudier les effets de l’exposition à la pollution lors des déplacements domicile-travail pour avoir une vision complète des effets sur le risque de cancer du sein.

La pollution modifie « l’architecture » du sein

Déjà en 2022, directement chez Esmo Charles Swanton, du Francis Crick Institute de Londres, avait présenté des recherches suggérant que les particules PM2,5 pourraient déclencher le cancer du poumon chez les non-fumeurs. « Ces très petites particules peuvent pénétrer profondément dans les poumons et pénétrer dans la circulation sanguine où elles sont absorbées par le sein et d’autres tissus. Il existe déjà des preuves que les polluants atmosphériques peuvent modifier l’architecture du sein. Il sera important de tester si les polluants permettent aux cellules du tissu mammaire présentant des mutations préexistantes de se développer et de favoriser le développement de tumeurs par le biais de processus inflammatoires, similaires à nos observations chez les non-fumeurs atteints d’un cancer du poumon », a déclaré Swanton. « Il est très préoccupant que de petits polluants atmosphériques et des résidus de microplastiques de taille infinitésimale circulent dans l’environnement alors que nous ne comprenons pas encore leur potentiel à favoriser le cancer. Il existe un besoin urgent de lancer des études en laboratoire pour comprendre les effets de ces petites particules polluantes sur la latence, le grade, l’agressivité et la progression des tumeurs du sein. »

L’engagement européen

Les résultats de cette étude suscitent une grande attention au niveau européen : « Il existe désormais de solides preuves épidémiologiques et biologiques du lien entre l’exposition aux particules PM2,5 et le cancer, et il existe de bonnes raisons cliniques et économiques de réduire la pollution afin de prévenir les tumeurs », a-t-il déclaré Jean-Yves Blay, directeur des politiques publiques chez Esmo. Suite à la proposition de la Commission européenne d’octobre 2022 visant à réduire la limite pour les particules PM2,5 dans l’air de 25 µg/m3 actuellement à 10 µg/m3 d’ici 2030, Esmo a appelé à une nouvelle réduction de la limite PM2, de 5 à 5 µg/m3. m3, conformément aux directives de l’Organisation mondiale de la santé sur la qualité de l’air. « Il est essentiel de réduire les particules PM2,5 dans l’air au niveau recommandé par l’OMS en raison de leur association avec divers cancers, notamment le cancer du sein », a ajouté Blay. « Nous avons la responsabilité de faire pression en faveur de ce changement, non seulement pour les citoyens européens mais aussi pour le monde entier, où le paysage de la pollution varie considérablement. » La limite inférieure a en effet été adoptée par la commission de l’environnement, de la santé publique et de la sécurité alimentaire du Parlement européen en juin 2023.

Vers une directive européenne

Plus récemment, en septembre 2023, le Parlement européen a adopté en séance plénière son rapport sur la révision en cours des directives de l’UE sur la qualité de l’air, qui reflète les recommandations de l’ESM visant à fixer la valeur limite annuelle pour les particules fines (PM2, 5) à 5 µg. /m³. Cette adoption ouvre des négociations interinstitutionnelles entre les colégislateurs – Parlement européen, Commission européenne et Conseil de l’UE – pour se mettre d’accord sur le texte final de la directive. « En étayant nos demandes par des preuves scientifiques solides, nous offrons une nouvelle dimension aux politiques de santé publique. Le travail n’est pas terminé et le changement ne se fera pas du jour au lendemain, mais nous allons dans la bonne direction », a conclu Blay.